Travail à la petite lampe. Silence que nul souffle ne ride. Soirées le matin tôt, qui enveloppent et replient. Il n’y a pas eu d’aube depuis des semaines. Cœur serré dans le café sans reflet. Travail à la petite lampe qui grésille doucement. Pas de moucheron sur la vitre, pas de pinson dans le grand frêne et d’ailleurs, ils l’ont coupé. Le livre que vous m’aviez offert est encore sur la table, je n’ai pas su l’ouvrir. La cartographie du monde, vos yeux sur le planisphère, votre index pointé là. Et là. Une écriture automatique à la petite lampe. Une ciselure, une incartade. Du gris au-dessus des moyennes saisonnières. Il n’y a pas d’heure, il n’y en a plus, le ciel a vidé le temps.
Et je vais vers la ville le dos tourné aux maigres acacias. Un monologue dans la buée froide, un sourire abrégé. L’aventure incertaine entre les balais d’essuie-glace. Quelle vérité nous fait-elle vivre ici? Vous reverrai-je après l’hiver ? Il y aurait un grand piano ici, ce serait mieux pour vous dire tout cela. Et les cadrans indiquent le soir. J’étais un peu en avance. Je rêve encore d’une phrase qui dirait toute la vie, une phrase égale à elle, définitive. Travail à la petite lampe. La petite lampe qui rassure, jusqu’au sommeil, repoussé au maximum, serré sans reflet.