Trincomalee, Sri Lanka, août 2011
Tout au bout de l’île, c’était comme tout au bout du monde : une impression de vide, avec la mer et le ciel inutiles, des cocotiers titubants et des vagues translucides au bruit mou. Les jeunes qui descendaient du village chaque soir fixaient le même tableau, espérant peut-être quelque chose d’improbable qui viendrait soudain briser l’horizon de leur journée : le passage d’un paquebot, une baleine ensablée, un nouveau phare pour éclairer la nuit. Sans me jeter un regard, sans même se parler, ils restaient là vingt ou trente minutes, entre chien et loup, jusqu’à ce que le sépia de leur mélancolie conspire avec l’ombre du soir. Plus tard, je me suis demandé si dans l’autre partie du monde, notre attitude était si différente de la leur. Cherchant l’introuvable sensation dans l’océan de nos spectacles rabâchés, guettant l’ivre sardine dans le gris que les novembres entassent.